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La Turquie et son rôle toujours plus important dans le Caucase



L’allié pérenne de l’Azerbaïdjan ?


Il est connu de tous le fait qu’Ankara a toujours apporté son soutien à Bakou sur la question du Haut Karabakh et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, cela peut s’expliquer de par les relations complexes entre la Turquie et l’Arménie, prenant leur source dans la non reconnaissance par la Turquie du génocide arménien de 1915 (Ardillier-Carras et Dumont, 2020). Pour Ankara, Erevan constitue un obstacle qui lui empêche d’atteindre le centre du Caucase, bridant ainsi les volontés d’expansion du pays (Dagenais, 2021).


De plus, la Turquie possède en son sein un puissant lobby azerbaïdjanais, qui pousse le gouvernement vers des prises de décision pro-azéris (Gordadze et Hurel, 2016). Les deux pays nourrissent un projet commun, à savoir celui de se rejoindre pour devenir « Deux États, une nation », ce qui impliquerait une suppression de l’Arménie dans le processus (Ardillier-Carras et Dumont, 2020). Il permettrait à Ankara de pouvoir relier Istanbul aux steppes de l’Asie Centrale (Balei, 2020). Ce projet est d’autant plus d’actualité que la Turquie a décidé après le coup d’État raté de 2016 de moins se préoccuper de l’opinion occidentale, ce qui lui permet de mener une politique plus poussée dans le cas du conflit au Haut Karabakh (Balei, 2020). Ce recul vis-à-vis de l’Europe et des États-Unis peut s’expliquer aussi par le fait que ceux-ci prennent ultimement parti pour l’Arménie et que la Turquie entretient des relations d’incompréhension avec les Occidentaux de façon générale (Balei, 2020). Elle a également décidé de moins se soucier du point de vue russe, malgré la relation accrue entre les deux pays (Balei, 2020).


Une concurrente à l’influence russe dans la zone ?

Durant l’administration Trump, il a été accordé plus de marge de manœuvre à la Turquie, de par la relation amicale entre les deux chefs de gouvernement (Zarifian, 2021). Washington a effectivement pris beaucoup de recul par rapport à ses prédécesseurs vis-à-vis du Caucase, au point de ne pas condamner la présence de mercenaires engagés par la Turquie dans le conflit au Haut Karabakh, argumentant que ça n’a peut être pas eu lieu alors que cela avait été confirmé par la presse internationale (Zarifian, 2021). Cela a permis au pays de s’impliquer de façon beaucoup plus décisive dans le conflit, au plus grand déplaisir de Vladimir Poutine. Les Ottomans regagnent alors une emprise dans le Caucase, alors que le tsar avait réussi à les éloigner de la zone (Balei, 2020).


La Russie ne peut effectivement plus se permettre d’être le seul acteur externe dans la zone, en plus du fait que la Turquie lui sert de pays tampon dans les conflits syrien et lybien (Balei, 2020). La Turquie est également une alliée contre l’Occident, puisque celle-ci entretient également des relations de rivalité avec l’Europe et veut éviter son ingérence dans les affaires internes du Moyen Orient, la Russie se doit donc d’entretenir des relations de proximité avec elle (Balei, 2020). Les deux pays ont des économies extrêmement imbriquées, ce qui entraîne une certaine co-dépendance qui se fait aussi sentir dans le domaine politique (Balei, 2020). La Turquie n’a pas la puissance médiatrice de la Russie, mais contraint les marges de manœuvre de celle-ci, ce qui illustre une augmentation de son importance et de son implication géopolitique dans la zone.


 

Bibliographie


- Ardillier-Carras, Françoise. & Dumont, Gérard-François. 2020. « La guerre pour quelles frontières : L’exemple du Haut-Karabagh dans le sud Caucase ». Les Analyses de Population & Avenir, 30, 1-18. https://doi.org/10.3917/lap.030.0001


- Dagenais, Lucie France. 2021. « Le front caucasien de la Turquie ». Diplomatie (112) : 44-47. https://www.jstor.org/stable/48631260


- Gordadze, Thornizé et Hurel, Tristan. 2016. « Le Haut-Karabagh, un territoire sous tension ». Diplomatie, (82) : 26–30. https://www.jstor.org/stable/26982792


- Balci Bayram .2020. « Face à la Turquie, la Russie toujours maître des horloges dans le Caucase ? » Orient XXI. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03021239/

- Zarifian, Julien. 2021. « Les États-Unis de Trump et la guerre du Haut-Karabagh ». Politique étrangère, (1) :119-129. https://doi.org/10.3917/pe.211.0119


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